Article rédigé le 18 juin 2024
Depuis l'accord de Paris sur le climat en 2015, de nombreux pays se sont engagés dans l'objectif de neutralité carbone. Cela signifie qu’ils vont tenter d’atteindre un équilibre entre les émissions de carbone et leur absorption, communément appelé « zéro émission nette » Pour limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C par rapport à l'ère préindustrielle, il est crucial d'atteindre cet objectif mondial d'ici 2050.
Pour y parvenir, l'Union européenne (UE) a adopté plusieurs mesures, notamment les quotas carbones et le Mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF). Dans le cadre de l'accélération de la transition écologique, l'UE a également décidé qu'à partir de 2035, la vente de voitures neuves à moteur thermique (modèles à essence, diesel et hybrides rechargeables) sera interdite dans toute l'Union.
Cette politique fait de l'UE un marché attractif pour les constructeurs de véhicules électriques à batterie.
Toutefois, certains pays, comme la Chine, se livrent à une concurrence déloyale en subventionnant leurs industriess.
En conséquence, certaines entreprises chinoises de fabrication de véhicules électriques font l'objet d'enquêtes de la Commission européenne pour concurrence déloyale et dumping.
Le 4 octobre 2023, la Commission européenne a ouvert une enquête antisubventions sur les importations de véhicules électriques à batterie en provenance de Chine.
En réponse, la Chine a ouvert en janvier 2024 une enquête antidumping sur les brandys européens, dont le cognac français. Lancée après une plainte de professionnels de l’alcool chinois, cette procédure apparaît comme une nouvelle étape de la guerre commerciale UE/ Chine et comme une mesure de rétorsion à l’enquête européenne sur les subventions aux voitures électriques produites en Chine, largement soutenue par la France.
Le 12 juin 2024, la Commission a provisoirement conclu que la chaîne de valeur des véhicules électriques en Chine bénéficie de subventions déloyales, mettant ainsi en danger les constructeurs de l'UE. L'enquête a aussi évalué les conséquences probables des mesures sur les importateurs, les utilisateurs et les consommateurs de véhicules électriques dans l'UE.
La Commission a donc engagé des discussions avec les autorités chinoises pour aborder ces conclusions et rechercher des solutions conformes aux règles de l'OMC.
Les droits anti-dumping
La Commission a également annoncé les niveaux des droits compensateurs (aussi appelés droits anti-dumpings) provisoires qu'elle pourrait imposer sur les importations de véhicules électriques à batterie en provenance de Chine.
Si les négociations avec les autorités chinoises n'aboutissent pas, ces droits compensateurs provisoires seront appliqués à partir du 4 juillet, sous forme de garanties décidées par les douanes de chaque État membre, et ne seront perçus que si des droits définitifs sont institués.
Ces droits antidumping (DAD) sont des droits de douane supplémentaires destinés à prévenir la sous-évaluation artificielle des prix d’un bien sur un marché étranger par un pays exportateur. Ils visent à rétablir une concurrence équitable entre les produits importés de pays tiers et ceux fabriqués dans l'UE. Ils ne sont pas conçus pour punir les importations, mais pour lutter contre des pratiques jugées déloyales, telles que l'exportation à un prix inférieur à sa valeur normale ou les subventions accordées par les pouvoirs publics du pays d’exportation, entraînant une baisse des prix.
Les droits individuels que la Commission appliquerait aux trois principaux constructeurs chinois seraient les suivants :
- BYD : 17,4 %
- Geely : 20 %
- SAIC : 38,1 %
Les autres constructeurs chinois qui ont coopéré à l'enquête mais n'ont pas été inclus dans l'échantillon seraient soumis à un droit moyen pondéré de 21 %. Ceux qui n'ont pas coopéré à l'enquête seraient soumis à un droit résiduel de 38,1 %.
Les produits soumis aux droits compensateurs provisoires sont les nouveaux véhicules électriques à batterie, principalement conçus pour le transport de neuf personnes ou moins, à l'exclusion:
- des véhicules des catégories L6 et L7 selon la classification de la Commission européenne conformément au règlement (UE) n° 168/2013,
- des motocycles, propulsés uniquement par un ou plusieurs moteurs électriques, y compris ceux équipés d'un prolongateur d'autonomie à combustion interne. Ils relèvent actuellement du code NC ex 8703 80 10 (code TARIC 8703 80 10 10) et sont originaires de la République populaire de Chine.
Cet épisode illustre l'engagement ferme de l'Union européenne à protéger ses intérêts stratégiques tout en respectant ses engagements climatiques. Ces mesures visent à instaurer une concurrence équitable, essentielle pour une transition écologique réussie et une économie durable.
La Chine, en mesure de rétorsion, a déjà annoncé l’ouverture d’une enquête antidumping sur les importations de porc et de produits à base de porc en provenance de l’Union européenne.
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